A partir de sa création, ce village fut desservi par le curé de Mers-el-Kébir, qui venait de temps en temps. L'abbé Cassan, alors vicaire à Saint-Louis d'Oran vint aussi célébrer la fête de Noël en 1853. L'érection canonique d'Aïn-el-Turck en paroisse eut lieu le 28 janvier 1857. L'église, placée sous la protection de Saint-Antoine de Padoue et d'un second titulaire : Saint-Pierre d'Alcantara, désignés tous les deux par l'évêque, mais seule la fête patronale de Saint-Antoine fut annoncée sur l'ordo. Les paroissiens, espagnols pour la grande majorité, respectaient toutes les fêtes d'obligation en Espagne. Ils avaient aussi une fête patronale civile le 13 août, consistant en amusement publics, fêtes de famille, etc. L'administration ne reconnut que cette fête car la fête de Saint-Antoine (13 juin) avait lieu dans un moment de pénurie générale et de travaux pressants; Aussi, malgré tout ce que put faire le desservant de la paroisse, le dimanche de la fête patronale officielle fut célébré comme tous les autres dimanches et passa inaperçu.
La construction de l'église débuta en 1850, les murs de la nef et chœur furent terminés en mai 1851 et bénits en même temps par l'évêque d'Alger qui y célébra la première messe. Achevée dans le courant de la même année, le culte n'y commença qu'en 1853. Dans cet intervalle, l'église ayant été polluée pour avoir servi d'habitation à plusieurs ménages, elle dut être officiellement "réconciliée". L'architecture était celle d'une maison d'habitation ordinaire dépourvue de toute décoration. Elle avait cinq fenêtres arquées sur les côtés latéraux. Les dimensions étaient de 15 m de longueur sur 8 et 5,75 de hauteur. Son unique autel en bois peint en faux marbre avec tabernacle, était placé dans une alcôve à voûte sphérique. L'église fut plafonnée en 1857 et sur les murs latéraux du vestibule fut bâti un clocher de 16 m de haut, terminé par un dôme. En février 1857, l'abbé Larcher, venant d'Aïn-Témouchent, fut le premier curé, remplacé en novembre 1868 par l'abbé Léon Caraman. En octobre 1870, l'église fut dévalisée pour la deuxième fois et dès cette époque les vols devinrent fréquents du fait de son éloignement du centre d'habitation. Dans l'église, on trouvait une lourde statue de la Vierge en plâtre doré qui fut souvent volée, croyant qu'elle était en or, et qu'on retrouvait toujours dans les buissons de palmiers nains entourant l'église, rejetée par les voleurs une fois constaté le peu de valeur de la chose.
Inventaire du 22 juin 1908 effectué en présence de l'abbé Louis Delmas, curé. Extrait du procès-verbal : "Eglise désaffectée édifiée sur le lot n°114 de la section C du plan d'urbanisme. Eglise à une seule nef éclairée par 8 fenêtres latérales munies de carreaux dont certains sont brisés. Elle a été construite par le service du Génie et aux frais de l'Etat. Elle a été, avec l'emplacement sur lequel elle est édifiée et ses dépendances, concédée gratuitement à la commune d'Aïn-el-Turck aux termes d'un décret du 1er mai 1879".
1910. Extrait d'un rapport établi par l'abbé Delmas et retrouvé à l'évêché d'oran : "L'église St-Antoine n'a pas été badigeonnée depuis qu'elle a été construite. Aussi ce monument, que le gouvernement se glorifie de nous laisser (après la loi de séparation des biens de l'Eglise et de l'Etat) tombe-t-il en ruine. L'église n'a aucun style et n'a jamais été consacrée, elle a eux autels ; seul l'autel principal possède la pierre sacrée. Le clocher est construit en pierre dure et se terminait par un dôme que la foudre a démoli en 1897. Il fut restauré "rugueusement" par le soin de l'assurance. La cloche sort des fonderies impériales et a pour parrain le général de Porandon et marraine Mme Gouvion. L'abbé Emile Huertas s'est servi de toute son influence pour obtenir de faire construire, contigu au presbytère situé en ville, un local qui lui permet de dire la messe tous les matins en semaine et d'y faire le catéchisme".
13 juin 1941. Lettre du chargé du service départemental des douairs d'Oran à l'évêque d'Oran : "J'ai l'honneur de solliciter de votre haute bienveillance l'autorisation d'installer dans la salle diocésaine Saint-Maurice à Aïn-el-Turck, un détachement de douairs des milices côtières. Actuellement, mes miliciens sont cantonnés dans l'ancienne église désaffectée située sur le plateau au sud du village. Ce bâtiment est vieux, ouvert à tous les vents et très inconfortable pour mes hommes. D'autre par, le clocher est vermoulu et menace de s'effondrer, ce qui pourrait provoquer un grave accident..."
Chapelle Saint-Antoine, du presbytère, deuxième lieu de culte.
A son arrivée, l'abbé Delmas installa définitivement le culte dans le presbytère après l'avoir doté d'un autel (le premier ayant été remis en place sur la réclamation de la population), de chaises et de la statue de Saint Antoine de Padoue, patron de la paroisse ; statue bénite par le vicaire général Bouissière en septembre 1899. L'église isolée sur le mamelon fut à peu près tous les ans cambriolée jusqu'à l'arrivé de l'abbé Delmas qui fit descendre le vestiaire de la chapelle. Cependant en 1900, l'église reçut encore des voleurs qui se retirèrent sans rien prendre , puisqu'il n'y avait plus rien.
13 juin 1900. Lettre-pétition d'habitants d'Aïn-el-Turck à l'évêque d'Oran : "nous, soussignés, propriétaires et habitants d'Aïn-el-Turck avons le regret de porter à votre connaissance certains faits qui se passent dans notre paroisse. A la suite des dernières élections municipales, un certain parti de notre village offrait un banquet dimanche 10 juin. M. le Curé n'a pas hésité à aller à ce banquet où nous croyons savoir que des chansons obscènes ont été chantées et que des propos bien malveillants ont été tenus contre le parti contraire. M. le Curé Delmas n'a pas craint de sortir de la réserve et de l'impartialité que ses fonctions lui font un devoir de garder ; nous ajouterons, Monseigneur, que la cousine de M. le Curé s'est livrée, le 31 mai, à une manifestation quelque peu déplacée. Vous estimerez certainement, Monseigneur, que la place de M. le Curé était ailleurs qu'à ce banquet des soi-disant 51 électeurs français et qui en réalité était composé en grande partie d'Espagnols, d'Arabes, de Marocains et même de protestants, et vous concevrez facilement qu'une grande partie de la population d'Aïn-el-Turck soit indignée par la conduite de son prêtre et soit décidée à ne plus assister aux offices et à entamer, si cela est nécessaire, une polémique de presse. Un tel état de choses ne saurait durer davantage ; nous avons donc le regret de vous demander, dans l'intérêt même de notre religion, le déplacement de notre curé..." Une vingtaine de signatures.
1906. Découverte d'un noyé à la "Grotte aux pigeons". Le 19 septembre, des habitants d'Aïn-el-Turck se trouvant dans la petite crique sableuse dite "Grotte aux pigeons", située à hauteur de la cantine Saint-Roch, à mi-chemin entre Aïn-el-Turck et Mers-el-Kébir, aperçurent au large, un corps flottant vers le rivage. Quand il ne fut plus qu'à quelques mètres, plusieurs d'entre eux se mirent à l'eau et ramenèrent le corps sur le sable. Il était vêtu d'une chemise et d'une soutane. Après enquête des autorités, les insignes épiscopaux dont était munie la soutane permirent de supposer que le corps pouvait être celui de l'évêque de Sao Paulo (Brésil), Mgr Camargo, ayant péri lors du naufrage du Sirio, survenu le 4 août près des îles Hormigas, sur les côtes d'Espagne, et qui fit près de 300 victimes. En janvier 1907, après avoir rendu les derniers devoirs à la dépouille mortelle de son vénéré collègue, l'évêque d'Oran informa le vicaire capitulaire du diocèse sud-américain, ainsi que le consul général du Brésil à Paris, que la dépouille de l'évêque avait été renfermée dans un cercueil en plomb et ensevelie provisoirement dans le cimetière d'Aïn-el-Turck. Comme prévu, les Brésiliens réclamèrent le corps. Le consul général du Brésil à Paris informa l'évêque d'Oran que, sur la demande du vicaire capitulaire du diocèse de Sao Paulo, il envoyait son protonotaire apostolique, avec un employé des pompes funèbres se Paris, pour faire procéder à l'exhumation et au transfert des restes de Mgr Camargo. Un service funèbre eut bien lieu à cette occasion dans la cathédrale d'Oran entre le départ du corps d'Aïn-el-Turck et son embarquement.
Saint-Maurice, troisième lieu de culte.